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Lutte biologique contre la bactériose

Lutte biologique contre la bactériose

La bactériose est une maladie bactérienne ancienne responsable de la majeure partie des pertes de récolte. Endémique de nos vergers (c’est-à-dire qu’elle est propre à notre territoire), elle est due à la bactérie Xanthomonas Arboricola juglandis (Xaj). Tous les organes du noyer peuvent être atteints et cela provoque la chute précoce des noix ou bien la récolte de noix non commercialisables.

A l’heure actuelle, les seuls produits permettant de lutter contre cette maladie sont des produits à base de cuivre. Et leur action est limitée par la quantité légalement utilisable mais aussi par l’apparition de résistances.

En effet, des travaux en laboratoire ont montré la faible sensibilité au cuivre de cette bactérie. Il est donc urgent et essentiel de trouver des méthodes de lutte alternative. Cela passe par l’optimisation du systèmes de défense des arbres et la diversification des techniques de lutte biologique.


Le principe des travaux du groupe repose donc sur l’identification des bactéries responsables de cette maladie et l’identification d’un bactériophage naturellement présent dans les vergers.

→ Les bactériophages, qu’est-ce que c’est ?

Les bactériophages sont des virus prédateurs de bactéries Xaj naturellement présents dans les vergers. Ils peuvent bloquer le développement des bactéries.
Généralement, une fois la cellule cible reconnue par des récepteurs spécifiques sur l’hôte bactérien, les bactériophages introduisent leur matériel génétique. Cela permet la synthèse de nouvelles particules virales en utilisant le système enzymatique de l’hôte bactérien. Les nouvelles particules virales sont libérées dans l’environnement, ce qui entraîne la mort de la bactérie par lyse cellulaire. Elles sont capables de reproduire ce processus avec des bactéries à proximité. C’est le principe de la thérapie par phage.

Ci-contre : Schéma de fonctionnement du cycle de réplication d’un bactériophage

→ Quel est le principe de la lutte ?

Le principe est de se servir de cette relation naturelle de parasitisme entre le bactériophage et la bactérie hôte pour lutter contre cette dernière.

La spécificité de ces bactériophages, c’est-à-dire leur gamme d’hôtes potentiels, est portée sur les bactéries Xaj grâce à des techniques de co-culture et de cros-streak (comprenant des isolats de Xaj chiliens et d’autres bactéries pathogènes pour la nuciculture). Tous les virus sélectionnés présentent cette activité lytique sur les isolats de Xaj (français et chiliens) mais pas contre les bactéries présentes couramment dans les cultures agricoles.


On identifie la bactérie Xanthomonas Arboricola juglandis (Xaj) présente en France ainsi que ses bactériophages spécifiques pour ensemencer le verger préventivement.

Les bactériophages sélectionnés sont spécifiques Xaj et n’ont aucune action contre les autres bactéries que l’on trouve couramment dans les cultures agricoles.

Ci-contre : Mise en culture de la bactérie pour l’identifier
Crédit photo : Station expérimental de Creysse

→ Où en sont les travaux ?

Durant l’été 2017 et 2018, nos collaborateurs chiliens sont venus dans les vergers des producteurs adhérents. Après avoir prélevé des échantillons, ils ont pu identifier les bactéries Xanthomonas Arboricola juglandis responsables de la bactériose dans nos vergers ainsi que les bactériophages endémiques. Ces travaux de mise en culture et d’identification ont été conduits à Toulouse dans le laboratoire EcoLab, partenaire de « La Noix de Demain ».
Les bactéries et virus bactériophages français endémiques ont été exportés au Chili pour sélectionner en laboratoire les souches de bactériophages les plus intéressantes.
Les ingénieurs du projet « La Noix de Demain » et de la Station Expérimentales de Creysse se sont aussi rendus au Chili en 2019 pour échanger, mettre en pratique et maîtriser techniques d’expérimentation des bactériophages et techniques de monitoring des bactéries pour le suivi des essais.
Les travaux d’identification sont terminés. Les essais au champ ont été réalisés en 2019 et sont réitérés pour cette année 2020.
Les bactéries françaises ont montré une faible sensibilité au cuivre en laboratoire. Cela démontre l’urgence de trouver des luttes alternatives efficaces et fiables.

Ci-contre : Equipe du laboratoire AgroAdvance au Chili et nos deux ingénieures
Crédit photo : Lydie Leymarie Lachaud, Comité des fruits à coques du Lot

→ Et pour la suite ?

Toujours dans le respect de l’accord conjoint de recherche entre « La Noix de Demain » et le laboratoire chilien AgroAdvance, les travaux de recherche et les investissements engagés conduiront à l’homologation et au développement d’un produit dans ce cadre partenarial.

Les réflexions se portent sur la mise en place d’un outil de production pour le développement du produit directement sur la Station Expérimentale de Creysse, partenaire du projet et potentiel prestataire de service dans le cadre du développement commercial.

Nous avons la possibilité de développer d’autres projets de recherche grâce aux investissements engagés dans les essais sur le bactériophage.

En effet, nous avons acquis du matériel de laboratoire (pour la mise en culture de microorganismes entre autres) pour la Station Expérimentale de Creysse mais aussi des savoirs-faire.
Ainsi, nous étendons nos travaux sur la lutte par biocontrôle à la problématique des champignons de conservation à travers le projet MAGIC. Ce projet s’inscrit totalement dans la dynamique de recherche et développement de « La Noix de Demain » puisque, ces dernières années, les maladies fongiques dans nos vergers semblent avoir un impact négatif de plus en plus fort sur les résultats de récolte et les potentiels de production. Il semble donc urgent de connaître réellement les mécanismes qui sont à l’œuvre de manière à traiter ce problème efficacement. Nous tentons, avec l’aide de Florent Trouillas, chercheur de l’université de Davis (Californie), d’identifier les agents pathogènes rencontrés dans les parcelles des producteurs du groupe. En 2019, après isolement de différentes souches, nous avons lancé une expérimentation visant à inoculer des branches et fruits dans le but de voir lesquelles sont pathogènes, suivre leur développement et comprendre leur mode d’action. Les essais seront reconduits en 2020 par la Station Expérimentale de Creysse, de laquelle nous sommes partenaires sur ce projet.